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Les microplastiques dans les eaux usées : état des lieux

Les microplastiques (MP) sont des particules de plastique dont la taille est comprise entre 0,1 µm et 5 mm qui résultent de la dégradation de produits en plastique plus volumineux ou conçus expressément à l’échelle microscopique. Ils se retrouvent dans les océans, les eaux souterraines et les eaux de surface et peuvent être ingérés par certains animaux aquatiques et s’accumuler dans la chaîne trophique. Par conséquent, ils représentent un enjeu majeur pour la santé humaine et pour l'environnement.

Une étude publiée en 2018 au Royaume-Uni a montré que la quantité de MP présente dans les eaux réceptrices était plus importante en aval de chacune des six stations d’épuration (STEP) étudiées et confirme ainsi que les effluents d’eaux usées – même traitées - sont une source de MP dans le milieu aquatique. D’autres sources importantes de MP dans l’environnement ont été identifiées ; les boues d'épuration appliquées sur les terres agricoles, les eaux de ruissellement et le dépôt aérien.

On estime que 10 à 20% des MP totaux arrivent dans les STEP.

Traitement des microplastiques dans les stations d’épuration conventionnelles

La plupart des MP retrouvés dans les stations d'épuration proviennent de fibres (polyester et nylon) émises lors du lavage de textiles et de microbilles provenant des cosmétiques.

La conception actuelle des STEP permet de retirer en moyenne entre 40 et 99,9% des MP des eaux usées, en fonction des procédés de traitement mis en place. Comme illustré sur la Figure 1, l’élimination se fait au cours des différentes étapes du traitement et la majorité des MP traités se retrouve dans les sous-produits et les boues d’épuration. Les performances d’abattement dépendent de nombreux facteurs dont la taille, la nature et la concentration des MP, la présence de matières grasses, les procédés de traitement et leur dimensionnement, la pluviométrie, etc. Notons que les méthodes de mesure et les unités employées pour la quantification des MP ne sont pas standardisées.

La majorité des MP sont éliminés au cours des prétraitements et du traitement primaire (50 à 98%). Ces étapes permettent généralement d’éliminer les plus grandes particules (1000 à 5000 µm) ; ce sont principalement les fibres piégées dans les flocs et les microbilles flottant à la surface. La présence d’un dégraisseur et l’injection de coagulant augmentent la capacité d’élimination des MP. Le type de coagulant impacte le taux d’abattement.

Lors du traitement secondaire, comprenant généralement un traitement biologique suivi d’une clarification, les MP résiduels sont piégés dans les flocs et biofilms qui sont éliminés par sédimentation/purge des boues et écrémage au niveau du clarificateur. Au terme de cette étape, on ne retrouve plus de MP de taille supérieure à 500 µm et le rendement d’abattement global des MP dépasse régulièrement les 85%. A ce niveau, la formation de biofilms autour des particules constitue un mécanisme important qui modifie les propriétés de surface et la densité relative des MP. Ainsi, le temps de contact est un facteur important dans leur élimination. Le traitement des effluents par un bioréacteur à membrane (MBR) permet d’excellents rendements éliminatoires (99,9%).

Les traitements tertiaires offrent une barrière supplémentaire permettant d’atteindre 98 à 99,9% d’abattement des MP des eaux usées. Leur efficacité dépend du procédé appliqué (filtre à disque, filtration sur sable, flottation, etc.). Les fractions résiduelles retrouvées dans les effluents en sortie de ces traitements sont des fragments de 20 à 190 µm principalement constitués de fibres qui traversent de manière longitudinale les filtres.

Les MP écartés des eaux usées se retrouvent dans les résidus de dégrillage, les graisses, les sables et les boues d’épuration. Les chiffres avancés au sujet de la concentration en MP dans les boues sont très variables d’une étude à l’autre. On retrouve des valeurs allant de 1500 à 170 000 MP/Kg de matières sèches.

Procédés spécifiques et émergents

La coagulation-floculation permet d’éliminer une partie des MP par déstabilisation et piégeage des particules. Une étude montre que l’utilisation de sels d’aluminium a permis d’éliminer près de 37% des MP inférieurs à 500 µm. Une autre indique 90% d’abattement de microbilles par électrocoagulation.

Quant à la filtration, les techniques membranaires (micro, ultra et nanofiltration) permettent d’éliminer les MP avec une efficacité de 95%. Des filtres à charbon actif en grains (CAG) ont quant à eux permis d’éliminer 61 % des MP contenus dans les effluents d’une station d’épuration urbaine

Des procédés d’oxydation avancée (AOP), généralement utilisés pour la dégradation de composés organiques récalcitrants, ont montré une élimination des MP allant jusqu’à 50% en fonction de divers paramètres réactionnels (dose et type de catalyseur, concentration en MP, température).

A côté de ces techniques éprouvées, de nouveaux procédés émergent. Citons, par exemple, l’emploi d’algues comme adsorbants spécifiques qui permettent d’agglomérer les MP en agrégats plus denses ou l’utilisation de structures poreuses de type « cadres organométalliques » ou hydrogels pour piéger les MP.

Conclusion

On considère actuellement que 10 à 20% des MP émis dans l’environnement transitent par les stations d’épuration. Ces MP sont essentiellement des fibres issues du lavage des textiles et des microbilles contenues dans les cosmétiques.

Les stations d’épuration urbaines conventionnelles ont la capacité de retirer en moyenne 40 à 99,9% des MP des eaux usées, selon les procédés mis en œuvre. Plus de 50% des MP sont éliminés au cours du prétraitement et du traitement primaire (écrémage et sédimentation). A la sortie du clarificateur, il reste généralement moins de 15% des MP initialement présents dans les eaux usées et, selon les procédés déployés, un traitement tertiaire permet d’atteindre un rendement global de 99,9% d’élimination.

Dans les filières traditionnelles, les MP retirés des eaux usées se retrouvent concentrés dans les sous-produits des stations (sables, graisses et boues).

La recherche concernant l’élimination spécifique des MP se concentre essentiellement sur des techniques sélectives permettant d’isoler ou de dégrader directement ces MP.

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